Quel est l’impact du cuivre sur une culture à inter-rang dans les sols viticoles

Quel est l’impact du cuivre sur une culture à inter-rang dans les sols viticoles

Pierre Eon, Thierry Robert, Jean-Pascal Goutouly, Violette Aurelle, Jean-Yves Cornu

 

Peut-on utiliser ces cultures pour phytoextraire le cuivre ?

Cover crop response to increased concentrations of copper in vineyard soils: Implications for copper phytoextraction, 2023. Chemosphere 329

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Pierre Eon ; Jean-Yves Cornu

Contexte

Les cultures végétales pour couvrir les sols, appelées cultures de couverture (CC) ou engrais vert, sont de plus en plus utilisées en viticulture. Elles permettent d’améliorer la structure du sol et sa fertilité, d’augmenter la teneur en matière organique et l'activité biologique, de diminuer l'érosion et le ruissellement, de limiter la germination et la croissance des mauvaises herbes, de fournir des habitats pour les prédateurs et les insectes. Les espèces les plus cultivées à l’inter-rangs des vignobles appartiennent aux familles des Poaceae, des Fabaceae et des Brassicaceae. Les Poaceae limitent l’érosion du sol et le lessivage des nutriments. Les Fabaceae enrichissent le sol en azote. Les Brassicaceae réduisent l'implantation des adventices en synthétisant des métabolites secondaires agissant comme herbicides.

Néanmoins, l'utilisation des CC pourrait être compromise à cause de la contamination en cuivre (Cu) des sols viticoles, due à l'application à long terme de fongicides à base de Cu pour lutter contre le mildiou. Cu est un micronutriment essentiel, mais il est phytotoxique à forte concentration, notamment quand il est phytodisponible, ce qui peut être le cas dans les sols sableux acides (Médoc, Graves…). La question est de savoir si la contamination des sols par le Cu est un obstacle à l'utilisation des CC en viticulture. Si ce n’est pas le cas, se pose alors la question de leur utilisation et notamment la possibilité de phytoextraire le Cu dans ces sols, afin de compenser la quantité de Cu pouvant être apportée sur une année par les fongicides (4 kg Cu ha-1 an-1). Cette méthode nécessite des CC capables d'accumuler le Cu dans leurs parties aériennes à des concentrations suffisamment élevées et produire une forte biomasse, puis de valoriser celle-ci, par exemple sous forme d'aliments pour animaux ou dans le cadre de l'écocatalyse.

Les objectifs de l’article sont d’évaluer la sensibilité au Cu des CC semées dans l'inter-rang des vignes (comment une augmentation des concentrations de Cu dans le sol affectait leur croissance, leur niveau d'accumulation de Cu ?) et de quantifier le Cu exportée par les CC dans des vignobles présentant des caractéristiques pédogéochimiques contrastées.

Expérimentations

Sensibilité au Cu des CC : CC semées sur des sols (pH 6,6) à des teneurs en Cu de 90 à 240 mg Cu kg-1. Brassicaceae : moutarde blanche + radis fourrager. Fabaceae : trèfle incarnat + féverole. Poaceae : avoine rude + seigle fourrager.

Phytoextraction du Cu par CC : sur 3 sols viticoles à la phytodisponibilité en Cu contrastée (VP1, VP2, VP3 : 70 à 170 mg Cu kg-1) et pH < 6,3. CC : trèfle incarnat, trèfle de Micheli et avoine rude.

Principaux Résultats

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Sensibilité au Cu des CC :

Les résultats suggèrent que les Brassicaceae sont particulièrement sensibles à l'excès de Cu, notamment au stade de la germination.

Les Poaceae sont plus tolérantes au Cu que les autres familles de CC parce qu'elles sont plus efficaces pour séquestrer le Cu dans les racines.

Phytoextraction du Cu par CC :

25 g Cu.ha-1 < extraction du Cu par CC < 166 g Cu.ha-1

Le trèfle incarnat est la CC qui phytoextrait le plus le Cu.

La phytoextraction du Cu est fonction de la production de biomasse et de la disponibilité du Cu (plus le Cu est disponible, plus l’accumulation dans les CC est importante).

Ce travail montre que la quantité de Cu exportée par les CC habituellement semées dans les inter-rangs des vignobles est trop faible pour compenser la quantité de Cu appliquée à l'aide de fongicides à base de Cu (4 kg.ha-1.an-1).